Deux mosquées de proximité

Publié le
V. S.

C'était une prière des musulmans de Toulouse. De ceux du Mirail, de ceux d'Empalot aussi. Avoir une mosquée digne de ce nom pour les fidèles de ces quartiers qui se bousculent dans des appartements transformés en salles de prière, des caves même, voire dans l'ancien dojo de la dalle de Bellefontaine (mosquée de Bellefontaine), ou l'ancien hangar à vélos d'Empalot (mosquée El'Nour). Dans des lieux de culte inadaptés où certains vendredis soirs, faute de place, des centaines de fidèles se retrouvent dehors.

Une véritable mosquée au Mirail ? Ce vœu est en passe de se réaliser. La mairie a donné son accord (lors du conseil municipal du 25 juin) pour vendre à l'Association cultuelle et culturelle islamique de France (ACCIF) un terrain, situé à la Reynerie, à l'angle du chemin de Lestang et de l'impasse Henri-Ramet, pour y construire une mosquée. La mosquée du Mirail. En donnant le feu vert à Mamadou Daffé, l'imam de Bellefontaine et président de l'ACCIF, le maire de Toulouse clôt ainsi la polémique qui a un temps divisé la communauté musulmane autour d'une « Grande mosquée », unique à Toulouse.

Il n'y aura donc pas de grande mosquée mais deux projets, deux lieux de culte. L'un au Mirail porté par l'ACCIF, l'autre à Empalot nourri par l'imam d'Empalot, Mohamed Tatai. Là encore, la mairie a rétrocédé un terrain à l'association Cercle de dialogue civilisationnel (CDC), représentée par Mohamed Tatai, pour qu'elle puisse y bâtir la future mosquée d'Empalot.

« Nous avons vendu ces terrains au prix des domaines, à charge pour les deux porteurs de projet de s'autofinancer », souligne le nouveau maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc. Ces deux mosquées s'implantent dans des quartiers où la communauté musulmane est importante et viendront remplacer ces salles de prière inadaptées.

Pas d'islam des caves

Jean-Luc Moudenc estime que la situation vécue jusqu'à présent dans les quartiers de Toulouse était de nature à « favoriser un islam des caves, un certain discours anti-français au profit d'un discours fondamentaliste. Il vaut mieux de vrais lieux de culte, entre les mains d'imams modérés et respectueux de notre pays. On vise l'intégration et la normalité. C'est un des moyens de lutter contre les dérives fondamentalistes qui affectent l'Islam. »

Mamadou Daffé (par ailleurs chargé de recherche au CNRS), se félicite de cette décision. « C'est un signe très fort d'intégration et de visibilité de voir où les musulmans prient ». La future mosquée du Mirail ne sera pas un lieu de prestige, mais un lieu pratique, de proximité, au cœur du quartier. Pour l'imam de Bellefontaine, il n'y aura pas de doublon avec la mosquée d'Empalot mais au contraire une réelle complémentarité.

Rachid Boumahdi, secrétaire général de la coordination des associations cultuelles et culturelles musulmanes de Midi-Pyrénées, partage aussi l'idée que Toulouse n'a pas besoin d'une grande mosquée mais de mosquées de proximité, de lieux où les personnes n'aient pas honte de prier. « Que ce soit à Empalot ou au Mirail il y a une forte concentration de population musulmane, qui n'a pas besoin de prendre le bus pour aller prier », surtout lorsque l'on sait qu'un musulman s'adonne à la prière jusqu'à cinq fois par jour.

Mosquée d'Empalot

A Empalot, les fidèles attendent désormais que le projet de mosquée du CDC prenne forme, à l'angle rue des Mouettes et rue Jean Lebat.

L'imam Mohamed Tatai, cet Algérien de 40 ans, perçu comme un guide spirituel par les fidèles, a revu son projet initial de mosquée à la baisse.

Il y a encore deux ans, il avait fait figure d'iconoclaste en portant le projet d'une mosquée sur les hauteurs de Pech-David qui a achoppé. La mairie n'a pas délivré le permis de construire. « A l'époque, Mohamed Tatai (actuellement en vacances en Algérie) suscitait quelque méfiance. Depuis, il serait entré dans le giron de la mosquée de Paris, dirigée par le grand recteur Dalil Boubakeur.

Une souscription avait été lancée auprès des fidèles réunissant plusieurs millions d'euros.

Au Mirail aussi l'imam Mamadou Daffé a levé des fonds au travers d'une collecte. « On espère ainsi garder l'indépendance des fidèles et de la mosquée ».

Avec suffisamment de salles pour contenir les quelques milliers de musulmans qui se pressent aux portes, lors des grandes fêtes de l'Aïd.


Opinions. Musulmans ou pas, les habitants des quartiers restent réservés

« Le droit d'avoir un lieu de culte décent »

Tous les riverains interrogés, musulmans pratiquants ou pas (ces derniers sont, encore, en grand nombre dans les quartiers), ont accueilli sinon avec joie, au moins avec un certain soulagement, l'idée d'édification d'un espace de culte qui contienne l'ensemble des fidèles pour la prière du vendredi, celle qui compte la plus grosse affluence.

Rachid, 22 ans est content mais réservé : « Ça n'est pas normal de suivre le prêche dehors, à l'extérieur de la salle de prière. Concernant l'endroit prévu pour remplacer le dojo de Belle fontaine, je pense qu'il n'est pas du tout judicieux. C'est déjà le casse-tête pour circuler et se garer quand il y a affluence au Géant Casino. Le terrain le plus adapté y compris pour ceux qui n'habitent pas à proximité serait à la place de l'ancien Midifac ».

Pour Julie, qui réside à Reynerie depuis 23 ans, « tout le monde a le droit d'avoir son lieu de culte décent ». Djillali, ancien éducateur de rue : « Un lieu de culte correct, c'est bien, c'est même normal. Des équipements sportifs et culturels c'est bie n aussi dans les quartiers. Et ceux où l'on veut ériger des mosquées en manquent cruellement ». Mikia déplore « la carence de structures (piscine, cinéma, maison de jeunes…), qu'une mosquée ne va pas endiguer. Kader lui est p our un édifice qui ne soit pas un enjeu éléctoral : « A construire une mosquée, autant qu'elle présente tous les aspects qui sont inhérents à la religion musulmane, avec les personnes compétentes pour diriger les services, religieux et aussi culturels. Le projet prévu ne répond qu'à un problème de places ».


Projet. L'exiguïté du terrain fait déjà craindre pour le stationnement.

Mosquée du Mirail : jusqu'à 2.000 fidèles

C'est un petit terrain diffus à l'angle du chemin de Lestang et de l'impasse Henri- Ramet. La future mosquée, dont le dossier de permis de construire est en cours, sera un bâtiment d'architecture modeste, simple. Pas de minaret ni d'architecture traditionnelle.

L'intérieur comptera plusieurs salles de prière, une salle d'exposition de l'art musulman ainsi qu'une bibliothèque religieuse. La future mosquée qui pourrait accueillir jusqu'à 2.000 fidèles dans ses murs devrait ouvrir ses portes en 2006-2007.

Elle sera bâtie par les fidèles eux-mêmes. Une souscription a été passée. Les fonds nécessaires pour acheter le terrain ont été réunis grâce notamment à la vente des anciens locaux du Dojo faisant office de mosquée, sur la dalle. La ville de Toulouse a racheté les locaux à l'ACCIF, promis à la destruction dans le cadre de la zone d'activités de Bellefontaine.

Si la création de la future mosquée est très attendue par les musulmans du Mirail, bon nombre d'entre eux émettent déjà des réserves quant aux possibilités de stationnement et de circulation dans cette zone très enclavée, derrière le centre commercial de Basso-Cambo.


3 questions à

Mamadou Daffé, l'imam du Mirail

Chargé de recherche au CNRS, Mamadou Daffé est l'imam du Mirail et le président de l'Association cultuelle et culturelle islamique en France (ACCIF).

Que signifie pour vous la création d'un lieu de culte au Mirail ?

C'est un signe très fort d'intégration et de visibilité. De voir où les musulmans prient. Cela correspond aussi à une réalité. Les musulmans de Toulouse sont des citoyens établis, qui ont choisi de vivre ici. Cela évitera des lieux de prière qui n'étaient pas dignes de ce nom

Qu'attendez-vous de cette future mosquée du Mirail ?

Surtout un côté pratique. Quelque chose de simple. Et de la proximité pour les fidèles. La future mosquée sera vraiment au cœur du quartier. C'est très positif pour nous.

N'auriez-vous pas préféré une Grande mosquée à Toulouse ?

La mosquée d'Empalot et la mosquée du Mirail sont très complémentaires. Les musulmans du Mirail ne sont pas ceux qui fréquentent la mosquée d'Empalot. Au Mirail, nous avons aussi beaucoup de jeunes et des jeunes qui prient en français. A Empalot, l'imam prêche en arabe. C'est aussi la mosquée la plus proche du centre ville. Il n'y a aucune compétition entre ces deux lieux de culte.

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